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| - Le Congrès a adopté lundi l'inscription de la liberté d'avoir recours à une IVG dans la Constitution.Un vote qui inquiète ses détracteurs, qui redoutent une "remise en cause" de la clause de conscience des professionnels de santé.Nous avons voulu savoir si la constitutionnalisation de l'IVG pouvait réellement rendre caduque le droit légal de ne pas le pratiquer.
L'émotion a été grande, à la hauteur du moment historique vécu lundi au Congrès. Mais la liberté "garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse", telle qu'elle va être inscrite dans la Constitution, compte aussi ses détracteurs. Ces derniers affirment que cette inscription risque de remettre en cause la clause de conscience des soignants. "La loi s'impose à la conscience qui oblige à donner la mort", commentait notamment l'ancien archevêque de Paris, Michel Aupetit, le 28 février dernier.
Des craintes auxquelles a voulu répondre le ministre de la Justice. Ce dimanche 3 mars, Éric Dupond-Moretti a assuré sur Radio J (nouvelle fenêtre) que l'inscription de l'IVG dans la Constitution "ne rend absolument pas" caduque cette clause, qui permet à tous les professionnels de santé de refuser de pratiquer une interruption volontaire de grossesse (nouvelle fenêtre). "On ne va pas violer les consciences", a-t-il asséné. Une sortie qui n'a pas eu l'air de satisfaire les opposants à ce texte. "C'est la fin de la clause de conscience pour les médecins et le personnel de santé", a lancé l'ancien ministre et proche d'Eric Zemmour, Philippe de Villiers, allant même jusqu'à décrire un "viol de conviction intime". Alors est-il vrai, comme s'en inquiètent les détracteurs, que le droit à l'IVG se verra désormais octroyer "une valeur supérieure, constitutionnelle, tandis que la clause de conscience demeurera au seul niveau législatif" ?
Deux libertés constitutionnelles
Pour rappel, la clause de conscience est en effet introduite dès 1975 dans la loi Veil (nouvelle fenêtre). Inscrite à l'article L2212-8 du Code de la santé publique, elle précise qu'"un médecin ou une sage-femme n'est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse, mais il doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser". Une concession faite à l'époque aux parlementaires hostiles à la légalisation de l'IVG, décrite aujourd'hui par ses détracteurs comme une notion garantissant un "juste équilibre". C'est en suivant cet argument que des sénateurs Les Républicains ont tenté, en vain, de faire adopter un amendement (nouvelle fenêtre)visant à inscrire dans la Constitution la clause de conscience.
Un amendement rejeté. Mais qui ne signifie absolument pas qu'à l'avenir la clause de conscience pourrait avoir moins de poids que la liberté d'avorter. (nouvelle fenêtre) Car si la notion ne figure pas explicitement dans l'article 34 de la Loi fondamentale, elle est bien protégée par la Constitution. Auprès de TF1info, Jean-Paul Markus, professeur de droit public, rappelle en effet que si la notion n'est présente que dans le Code de santé publique, "elle a été rattachée à la Constitution par le biais de la liberté d'opinion". Juridiquement, le Conseil constitutionnel a en effet reconnu en novembre 1977 la portée constitutionnelle de la clause de conscience la rattachant à la liberté d'opinion. Dans un sens comme dans l'autre, d'ailleurs. En 2001, l'institution a également étroitement circonscrit la portée de cette garantie aux seuls praticiens, relevant que cette liberté ne s'étendait pas à la possibilité pour le cadre d'un service hospitalier de s'opposer à ce que des IVG se déroulent dans son service.
Pour le professeur de droit public à l'Université Paris-Saclay, et membre des Surligneurs, il ne fait aucun doute que la liberté des soignants sera protégée "au même titre que l'IVG". Elles auront le même niveau constitutionnel. "Il s'agit de deux libertés constitutionnelles, donc on ne peut pas en écraser une au profit de l'autre."
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