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| - Sur TikTok, un avocat a expliqué ces derniers jours que la dégradation d'un radar était sanctionnée par la loi.En revanche, a-t-il assuré, l'obstruer avec une bâche, un drap ou un sac-poubelle ne "constitue pas une infraction à la loi pénale".Si la sécurité routière n'est pas de cet avis et met en garde contre une peine allant jusqu'à 15.000 euros d'amende, les auteurs de "bâchage" sont, en pratique, peu menacés.
Sur le réseau social TikTok, un avocat en droit routier partage régulièrement des informations à ses 80.000 abonnés via de courtes vidéos. Dans l'une des plus récentes, il se penche (nouvelle fenêtre) sur les radars automatiques, et plus précisément les peines encourues par les auteurs de dégradations. Des sanctions assez lourdes sont prévues si l'appareil est endommagé, prévient-il, mais la législation est, à l'entendre, bien moins sévère si le radar est juste recouvert d'une bâche.
Une telle obstruction, note-t-il, "ne constitue pas une infraction à la loi pénale". Il indique que la loi, "étant d'interprétation stricte", ne peut pas conduire à voir dans un bâchage une forme de dégradation, puisque le radar qui est dessous est intact.
Des tribunaux aboutissent à des conclusions variables
Sur son site, la sécurité routière a dédié une page spécifique (nouvelle fenêtre) à la dégradation des radars. Il est notamment indiqué que "pour avoir détruit ou endommagé un radar (incendie, vol, explosion) : l'auteur des dégradations risque jusqu’à 75.000 euros d’amende et cinq ans d’emprisonnement". Par ailleurs, si quelqu'un était poursuivi pour avoir "apposé des autocollants, fait des graffitis, occulté ou bâché les vitres d'un radar", il risquerait "jusqu’à 15.000 euros d’amende et une peine d’intérêt général".
Pour tenter d'y voir plus clair et de faire le tri entre ces informations contradictoires, TF1info a sollicité le professeur de droit pénal Jean-Baptiste Thierry. Selon lui, les articles du Code pénal mis en avant par la sécurité routière apparaissent assez fragiles dans le cas d'un bâchage. Ceux-ci évoquent en effet la "destruction, la dégradation ou la détérioration d'un bien", ou bien encore le fait "de tracer des inscriptions, des signes ou des dessins, sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain".
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L'enjeu vient "de l’appréciation que l’on aurait de la notion de dégradation", estime le juriste. Pour autant, selon lui, dégrader "suppose de porter une atteinte au bien lui-même". Dans le cas d'une bâche ou d'un drap déposé sur un radar, "s'il n’y a pas la moindre éraflure ou autre, je vois difficilement comment on pourrait caractériser l'infraction". Le spécialiste note qu'aucune jurisprudence n'existe en la matière, la Cour de cassation n'ayant jamais été sollicitée dans un tel dossier. Les tribunaux qui ont instruit des affaires de cette nature ne nous permettent guère de trancher la question, puisque les auteurs de tels faits ayant été poursuivis ont pour certains été relaxés, et pour d'autres condamnés.
Avocat, Me Patrice Duponchelle a défendu des Gilets Jaunes qui avaient été poursuivis en 2019 après avoir couvert un radar d'un sac-poubelle. Les deux hommes avaient été condamnés, mais les juges n'avaient pas motivé leur décision en mettant en avant des dégradations. C'est en effet l'article R. 418-3 du Code de la route (nouvelle fenêtre) qui a été invoqué à l'époque, selon lequel il est "interdit d’apposer des placards, papillons, affiches ou marquages sur les signaux réglementaires et leurs supports ainsi que sur tous autres équipements intéressant la circulation routière".
Dans cette affaire, les prévenus s'en étaient tirés avec une condamnation minime. 100 euros avec sursis, soit en pratique seulement "31 euros de frais de justice", résumaient (nouvelle fenêtre) les médias locaux qui couvraient l'audience (moins 20% si la somme était versée dans les 30 jours). Nous sommes ici bien loin des sommes allant jusqu'à 15.000 euros évoquées par la Sécurité routière. Pas directement évoqué dans les textes, le bâchage des radars ne constitue donc pas en lui-même une contravention spécifique. Et ce n'est pas forcément un problème, selon Jean-Baptiste Thierry, qui n'est "pas certain qu'il faille l'envisager". Après tout, glisse-t-il, il s'agit d'agissements "pour lesquels nous aurions du mal à faire encourir une peine significative, et qui se révéleraient surtout difficile à caractériser".
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