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| - Sur le plateau de LCI, le Premier ministre a évoqué la délicate question de la fin de vie et de l'euthanasie, partageant certaines réserves personnelles.François Bayrou a évoqué la situation en Belgique, où des adolescents auraient selon lui bénéficié d'une aide à mourir "simplement parce qu'ils étaient mal dans leur peau".C'est faux : seuls six mineurs ont connu une euthanasie chez nos voisins depuis 2014 et la loi ne prend pas en compte les affections psychiatriques avant l'âge de 18 ans.
Invité de LCI lundi soir, François Bayrou a abordé des sujets très variés, qu'il s'agisse du budget, de l'immigration ou de la justice des mineurs. Il a aussi évoqué une future loi sur la fin de vie, qui sera scindée en deux, avec d'un côté les soins palliatifs et de l'autre l'aide à mourir. L'occasion pour le Premier ministre de faire part des réserves qui sont les siennes à titre personnel au sujet de l'euthanasie et de faire référence à la situation observée en Belgique. Chez nos voisins, a glissé le chef du gouvernement, "on a apporté cette aide à mourir à des adolescents, simplement parce qu'ils étaient mal dans leur peau". C'est faux.
Dans la loi belge, les affections psychiatriques ne sont pas retenues pour les mineurs
Devant sa télévision, le président de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) a bondi en écoutant les propos du Premier ministre. Jonathan Denis a réagi et accusé ainsi François Bayrou de "manipuler le débat sur le sujet de la fin de vie", en s'appuyant notamment sur l'exemple belge.
Pour savoir comment s'applique la loi chez nos voisins et ce qu'elle recouvre précisément, TF1info a sollicité Jacqueline Herremans, présidente de l'ADMD belge et coprésidente de la commission d'évaluation et de contrôle de la loi euthanasie outre-Quiévrain. Elle rappelle que les textes législatifs ont évolué en 2014 (nouvelle fenêtre), afin que l'aide à mourir soit étendue aux mineurs. Pour autant, la spécialiste tient à apporter une précision importante : en Flandre comme en Wallonie, "l'euthanasie n'est pas possible pour une cause psychiatrique" avant l'âge de 18 ans.
En pratique, "cela ne peut concerner que des enfants touchés par des maladies incurables, avec une brève échéance de décès", précise Jacqueline Herremans. Une échéance qui "se calcule en jours, en semaines, en mois, mais jamais en années". Cancers, maladies neurologiques... Seules des pathologies très lourdes sont concernées, pour des jeunes "qui n'ont plus une vie d'enfants, qui ne vont plus à l'école et ne peuvent souvent plus évoluer librement au sein de leur foyer".
La présidente de l'ADMD note qu'en Belgique, aucune limite d'âge n'a été fixée, contrairement par exemple aux Pays-Bas où elle est établie à 12 ans. Une "capacité de discernement" doit toutefois être établie et "confirmée par un pédopsychiatre ou par un psychologue". Il s'agit ici d'un avis contraignant : "Si les professionnels estiment que l'adolescent ne dispose pas de discernement, on ne va pas plus loin". Une autorisation des deux parents se révèle dans le même temps indispensable, avec – là encore – un blocage de la procédure si l'un des tuteurs fait part de son opposition.
Seulement six cas enregistrés depuis 2014
Après avoir écouté François Bayrou, Jacqueline Herremans tient également à préciser que l'aide à mourir n'a concerné depuis 2014 qu'un nombre très restreint de mineurs. Six en tout et pour tout, glisse la représentante de l'ADMD. Des jeunes atteints de maladies incurables et dont les médecins ont accepté d'abréger les souffrances.
Il faut aussi avoir à l'esprit que si des causes psychiatriques peuvent être invoquées par des personnes majeures pour solliciter une euthanasie, cela ne concerne en Belgique qu'une fraction des cas. En 2023, sur les 3423 euthanasies réalisées, 48 l'ont été des affections psychiatriques. Des dossiers encore plus complexes que les autres, puisqu'il est "difficile pour les médecins d'identifier des marqueurs objectifs". Il en résulte des "processus plus longs", ponctués par "l'intervention obligatoire de deux psychiatres". Ces derniers "ne vont pas se contenter de donner un avis, mais ils vont aussi engager une concertation avec les différents professionnels de santé qui entourent la personne".
Si Jacqueline Herremans juge la question de l'euthanasie délicate, estimant que chacun demeure libre de "ne pas y adhérer", elle déplore que les débats publics soient parasités par fausses informations. L'ancien Premier ministre belge Elio Di Rupo, aujourd'hui eurodéputé, a quant à lui fustigé les propos (nouvelle fenêtre) "ahurissants et déconnectés de la réalité" tenus par François Bayrou. Sur le réseau X, il a dénoncé le relais d'une "contre-vérité choquante et méprisante pour les soignants qui appliquent" en Belgique "avec rigueur et humanité" la loi de 2014.
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