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| - Le Rassemblement national accuse très régulièrement le camp présidentiel de vouloir supprimer le "droit de veto" de la France au Conseil de l'Union européenne.Même si la majorité souhaite revenir là-dessus, voilà pourquoi il n'est pas tout à fait juste de présenter les choses comme ça.
C'est l'un des argument préféré de l'extrême droite pour démontrer que la majorité présidentielle veut "faire disparaître la France dans la création d'un Etat européen" (nouvelle fenêtre). Encore jeudi soir lors du débat qui l'a opposé au Premier ministre Gabriel Attal, Jordan Bardella a accusé le camp présidentiel de vouloir supprimer le "droit de veto" dont dispose la France au Conseil de l'Union européenne. Valérie Hayer (nouvelle fenêtre) "souhaite supprimer le droit de veto de la France. C'est le cœur des Nations, c'est le cœur de la souveraineté de la France, c'est le cœur de la souveraineté populaire, qui permet précisément au Conseil, à une Nation, de dire 'non'", a déclaré la tête de liste du Rassemblement national. Qu'en est-il ?
Tout d'abord, de quoi parle-t-on ? Le "droit de veto" évoqué par Jordan Bardella fait référence au mode de scrutin en vigueur au Conseil de l'UE. C'est là que siègent les ministres des Etats membres, là qu'ils votent pour adopter, rejeter ou modifier les projets de loi de la Commission européenne. Mais leur mode de scrutin diffère selon les sujets sur lesquels ils ont à se prononcer. La majorité qualifiée est nécessaire dans des domaines comme l'agriculture, le transport, l'environnement ou le numérique. 80% des actes législatifs de l'UE sont adoptés à la majorité qualifiée (si 55% des Etats membres soit 15 sur 27 votent pour, et si la proposition est soutenue par des Etats membres représentant au moins 65% de la population totale de l'UE).
L'unanimité, requise dans certains domaines seulement
Mais dans des domaines plus sensibles et plus restreints, à savoir la fiscalité, la citoyenneté, l'élargissement de l'UE, la politique extérieure ou la révision des traités, l'unanimité est requise. Si un seul des Etats membres vote contre, le texte discuté n'est pas adopté. C'est à cela que fait référence le "droit de veto" évoqué dans cet article, même si le site de legal-checking Les Surligneurs (nouvelle fenêtre)explique dans un article daté d'avril 2024 que la dénomination est trompeuse. "Le droit de veto n’existe pas formellement en droit au sein de l’Union européenne comme il existe par exemple au Conseil de sécurité des Nations Unies", lit-on dans cet article analysant une proposition de Raphaël Glucksmann pour assouplir ce "droit de veto". "Le résultat n’est certes pas très différent : un Etat bloque les autres. Mais juridiquement et symboliquement, la démarche est très différente."
Qu'en est-il de la position de la majorité ? Dans le programme (nouvelle fenêtre) de Valérie Hayer, on lit au chapitre "démocratie européenne" qu'elle veut "rendre les institutions européennes plus efficaces et démocratiques" en abandonnant l'unanimité pour la majorité qualifiée. Elle cite trois exemples dans lesquels elle aimerait que soit abandonnée l'unanimité : les sanctions, la fiscalité et l'Etat de droit. Cela ne concerne donc pas tous les domaines actuellement concernés par le vote à l'unanimité.
Il y a un domaine sur lequel il faut l'unanimité et la garder."Clément Beaune
C'est ce qu'a confirmé ce vendredi matin sur Sud Radio Clément Beaune, porte-parole de la liste présidentielle "Besoin d'Europe". "Il y a un domaine sur lequel il faut l'unanimité et la garder, ce sont les sujets constitutionnels quand vous voulez changer les traités européens", a assuré l'ancien ministre d'Emmanuel Macron.
En proposant d'élargir les votes à la majorité qualifiée, le camp présidentiel souhaite éviter des blocages. Lors de son débat face à Jordan Bardella, Gabriel Attal a pris en exemple la taxation des géants du numérique à l'échelle européenne. "Avec le droit de veto, le Luxembourg, l'Irlande, qui ont des règles fiscales un peu de dumping par rapport aux autres, évidemment qu'ils s'y opposeront toujours", a argumenté le chef du gouvernement. Aussi, un membre de l'UE est particulièrement montré du doigt, habitué à user de son droit de veto : le Premier ministre hongrois Viktor Orban. Il l'a plusieurs fois utilisé pour bloquer ou édulcorer des déclarations critiques de l'UE sur la Chine concernant la question des droits humains. Au début de l'année, il l'avait brandi sur l’aide financière de 50 milliards d’euros destinée à l'Ukraine, avant de le lever sous la pression.
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En conclusion, le camp présidentiel ne souhaite pas "supprimer" le "droit de veto" de la France au Conseil, mais plutôt élargir les domaines dans lesquels la majorité qualifiée serait nécessaire pour faire adopter des textes. Dans d'autres comme la modification des traités, la France plaide pour conserver l'unanimité. De toute façon, pour modifier cela, il faudrait recueillir... une unanimité des 27.
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