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| - Alors que le NFP défend la hausse du Smic à 1600 euros, le reste de la classe politique se montre globalement opposé à une telle mesure.François Bayrou met par exemple en garde : selon lui, augmenter le salaire minimum aurait pour conséquence de démultiplier le nombre de salariés au Smic.Qu'en disent les économistes ?
Parmi les propositions phares portées par le Nouveau Front populaire lors des législatives, on retrouvait l'augmentation du Smic à 1600 euros. Une mesure à laquelle la droite et le centre ne souscrivent pas, comme en témoignent certaines prises de position récentes. Maire de Pau et président du MoDem, François Bayrou a notamment mis en avant lors d'une interview le "schéma normal" qu'il défend. À ses yeux, le Smic "permet aux plus jeunes d'entrer dans le monde du travail", pour qu'après, "leur salaire monte". Il met en garde contre une société dans laquelle "vous restez au Smic", et assure que plus vous augmentez le salaire minimum légal, "plus vous avez de personnes au Smic". Une fausse bonne idée, donc, aux yeux de l'ancien ministre.
Un "effet de diffusion" à ne pas négliger
De prime abord, le raisonnement de François Bayrou semble plutôt logique... Et mathématique. En imaginant qu'un gouvernement élève le salaire minimum à 1600 euros, le nombre de salariés au Smic va dans la foulée progresser. Tous les travailleurs jusque-là payés entre le Smic et 1600 euros viennent en effet s'ajouter à ceux qui étaient déjà au Smic avant la hausse.
Pour autant, les économistes notent qu'en pratique, le marché du travail ne demeure pas insensible à une telle évolution des bas salaires. Ils décrivent ainsi ce qu'ils nomment un "effet de diffusion" sur le reste des rémunérations. "On admet généralement qu’une hausse du Smic a des effets plus diffus sur l’échelle des salaires et se propage à des niveaux de salaire supérieurs au salaire minimum. L’explication avancée est que les partenaires sociaux négocient de nouvelles grilles salariales – dans des accords d’entreprise ou des conventions collectives", faisait remarquer en juillet une note de l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES).
Attention toutefois : tous les salariés ne bénéficient pas de ce fameux "effet de diffusion". Ceux qui se trouvent dans la fonction publique demeurent dépendants du point d'indice, tandis que ceux du privé peuvent l'espérer uniquement s'ils se trouvent dans des tranches salariales basses. Les travaux menés par les économistes tendent ainsi à montrer que des effets se manifestent jusqu'aux salaires qui s'établissent à 1,5 fois le Smic. Au-delà, les conséquences apparaissent négligeables, voire nulles.
"Lorsque vous avez une indexation du Smic sur l'inflation, effectivement, en général, branches professionnelles et entreprises renégocient pour respecter la hiérarchie des salaires", a confié l'économiste Bertrand Martinot à BFM Business. Ce collaborateur de l'Institut Montaigne, un think tank libéral, note cependant qu'une "hausse de 14% n'est pas absorbable de la même façon qu'une indexation du Smic sur l'inflation à 1 à 2%". En cas de très forte hausse du salaire minimum, "les entreprises seraient sommées d'engager un effort double : l'augmentation des salaires les plus bas, et l'augmentation générale des salaires qui en sont proches", note-t-il. Ce qui lui fait conclure que le "coût à supporter serait trop fort".
Si François Bayrou omet de prendre en considération dans son argumentaire les potentiels "effets de diffusion" en cas de hausse du Smic, force est de constater qu'il s'agit de mécanismes très délicats à prévoir ou à quantifier. "Les conséquences de ce phénomène sont complexes à analyser dans la mesure où elles sont la résultante de processus dont les configurations sont très variées, à la fois selon le secteur ou la branche d’activité, mais aussi en fonction des caractéristiques propres de chaque entreprise", résume l'IRES. Pour cette raison, "on dispose de très peu d’informations pour estimer l’impact d’une hausse du salaire minimum sur la formation des salaires", résume l'Institut, dans un passage qui s'assimile à un appel à la prudence sur cette question précise.
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