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| - Pour effectuer des économies et lutter contre les déficits, des voix s'élèvent pour réclamer une contribution plus importante des retraités.Les premiers "baby-boomers" seraient privilégiés : en ligne, on peut lire qu'ils perçoivent à la retraite des sommes deux fois supérieures à celles cotisées pendant leur carrière.Il s'agit d'affirmations confirmées par des économistes : graphiques à l'appui, ils montrent l'évolution dans le temps d'un indicateur instructif, le "taux de récupération".
Pour résorber le déficit public et améliorer les finances de l'État, faut-il mettre à contribution les retraités les plus aisés ? Cette idée, évoquée dans un premier temps par la ministre du Travail, a finalement été écartée par son collègue Eric Lombard, installé à Bercy.
De nombreux actifs estiment pourtant qu'il serait logique que les retraités participent à l'effort collectif. Sur les réseaux sociaux, des salariés estiment que de nombreux seniors sont aujourd'hui très bien lotis, voire carrément "privilégiés". Au-delà de la question de l'âge de départ à la retraite, repoussé au fil des réformes, on peut lire sur les réseaux sociaux que les retraités actuels perçoivent en cumulé des sommes deux fois supérieures à celles qu'ils ont cotisées au cours de leur carrière.
Un système de retraite plus avantageux à l'issue de la Seconde Guerre mondiale
Les internautes qui partagent ces affirmations renvoient souvent à un graphique (nouvelle fenêtre) posté sur X il y a deux ans par l'économiste
Maxime Sbaihi. Ce dernier avait profité des débats autour de la dernière réforme des retraites pour attirer l'attention de ses abonnés sur le "taux de récupération" du régime de retraite, un indicateur qu'il jugeait instructif. Son constat ? "La première vague des boomers touche aujourd'hui deux fois ce qu'elle a cotisé pendant sa vie active". Une situation qui a très largement évolué puisque, dit-il, "les générations suivantes ne peuvent qu'en rêver".
Le taux de récupération du régime de #retraite rapporte le montant des pensions perçues au montant des contributions versées. 👉La 1ère vague des #boomers touche aujourd'hui 2 fois (!) ce qu'elle a cotisé pendant sa vie active. Les générations suivantes ne peuvent qu'en rêver... pic.twitter.com/ByW1USHXCt — Maxime Sbaihi (@MxSba) January 10, 2023
De quoi parle-t-on lorsque l'on évoque ce "taux de récupération" ? Sur son site internet, le Conseil d'orientation des retraites (COR) explique (nouvelle fenêtre) que cet indicateur illustre "le rapport entre la masse des pensions reçues pendant la période de retraite et la masse des cotisations versées". Le COR ajoute que lorsque "le taux de récupération est supérieur à 1, l'assuré a récupéré plus qu'il n'a versé". En résumé, dans cette situation, la durée de retraite se révèle "supérieure au délai de récupération".
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Le graphique mis en avant par Maxime Sbaihi est issu de travaux réalisés par d'autres économistes, parmi lesquels Julien Navaux. Avec plusieurs confrères, ce spécialiste de l'équité intergénérationnelle et du vieillissement démographique a réalisé en 2016 un document intitulé "Les réformes récentes des régimes de retraite sont-elles équitables ?". Publiée par France Stratégie, cette analyse a évoqué (nouvelle fenêtre) plusieurs indicateurs, parmi lesquels le fameux "taux de récupération".
L'évolution de ce taux, dixit les auteurs, illustre "une forte inégalité de traitement entre les générations qui ont bénéficié de la montée en puissance du système de retraite, sans en avoir supporté les charges, et les générations qui ont commencé à cotiser lorsque celui-ci avait atteint sa phase de maturité". En pratique, les individus nés en 1955 perçoivent en moyenne le double des sommes cotisées au cours de leur carrière. Le système se révélait plus généreux encore pour les personnes nées en 1940 : parmi les premières à bénéficier du système par répartition, elles pouvaient escompter un montant total de leurs pensions environ 3,5 fois supérieur à celui de leurs cotisations cumulées. Les économistes jugent cet écart tout à fait prévisible, "inhérent à la mise en place d’un régime de retraite par répartition".
Une baisse notable du ratio cotisants / retraités
Dans leurs publications, les économistes expliquent que les générations de baby-boomers sont les bénéficiaires d'un phénomène dit du "free lunch" (ou "déjeuner gratuit" en français). Ce terme anglophone est utilisé pour signifier qu'ils se trouvent – sans même l'avoir demandé – favorisés par un système en pratique très avantageux pour eux. "Le régime de retraite n'était pas encore monté en puissance pendant leur vie active. Cette génération, une fois arrivée à la retraite, a bénéficié de l'arrivée à pleine puissance du système. Mais ce n'est pas de leur responsabilité. On observe ça pour chaque création d'un nouveau régime", a confié (nouvelle fenêtre) à Franceinfo Lionel Ragot, l'un des coauteurs des travaux partagés par France Stratégie.
Pour les générations suivantes, à partir des années 1970, le taux de récupération a diminué de manière notable. Il s'est stabilisé à environ 130%, ce qui signifie que l'on s'attend à ce que les futurs retraités, nés entre 1970 et l'an 2000, perçoivent à la retraite des sommes cumulées 1,3 fois supérieures à celles cotisées au cours de leur carrière. L'explication de cette baisse s'explique en grande partie par une proportion moindre de cotisants par rapport aux retraités. Alors qu'en 1970, on comptait près de 4 cotisants pour 1 retraité, nous sommes aujourd'hui proches (nouvelle fenêtre) d'un ratio de 1,7 pour 1.
Il est important de souligner que les statistiques relatives au taux de récupération s'appuient sur des moyennes. En conséquence, elles ne traduisent pas les disparités qui peuvent être observées entre les retraités, y compris au sein d'une même classe d'âge. Entre les cadres et les ouvriers, l'Insee note (nouvelle fenêtre) par exemple que la différence d'espérance de vie est de cinq ans chez les hommes et trois ans chez les femmes. Puisqu'ils meurent en moyenne plus tôt et ne bénéficient pas nécessairement de modalités permettant de finir plus tôt leur carrière, les ouvriers passent généralement moins de temps que les cadres à la retraite. Sans oublier les salariés qui succombent à des maladies avant même la fin de leur carrière. Ces individus, que l'on peut difficilement présenter comme des privilégiés, auront parfois cotisé pendant près de quatre décennies, sans toucher en définitive le moindre euro de pension.
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