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| - Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, le nombre de contenus trompeurs fait florès sur TikTok.Auprès des Vérificateurs, la plateforme souligne le travail de modération mis en œuvre.
On le sait, le conflit en Ukraine est aussi une guerre de l'information. Et pour livrer son propre récit, quoi de mieux que les réseaux sociaux ? Plateforme préférée de la jeune génération, TikTok n'échappe pas à cette règle, loin de là. Ainsi, la viralité des contenus que l'on y trouve sur la guerre n'a pas d'équivalent. Quitte à encourager la désinformation.
Le "fantôme de Kiev" sur TikTok
Pour preuve, les hashtags #Russia et #Ukraine ont chacun comptabilisé 125 et 108 milliards de vues depuis février 2022, d'après les données transmises par Visibrain, une plateforme de veille des réseaux sociaux. Depuis l’invasion russe du pays, l'équipe des Vérificateurs a pu constater l'omniprésence sur cette plateforme des fausses informations sur le sujet. Cela a été le cas du "fantôme de Kiev"... qui n’existait tout simplement pas. Des vidéos sur ce personnage inventé sont encore visibles aujourd'hui. "TikTok, c’est vraiment le réseau de l’époque, souligne Marie Peltier, spécialiste de la désinformation. Pensons aux printemps arabes, ce sont des guerres qui se sont aussi beaucoup jouées sur les réseaux sociaux, Twitter ou Facebook. Et aujourd’hui, on voit la continuité de ça avec un réseau un peu différent, qui est basé sur le divertissement et qui est la propriété d’une entreprise chinoise n'obéissant pas forcément aux règles de modération démocratique." En effet, TikTok est détenue par le groupe chinois ByteDance.
Par ailleurs, si la désinformation se poursuit sur l'application, elle remonte aux premiers jours, voire aux premières heures, de la guerre. Dans une enquête de mars 2022, la startup NewsGuard prévenait qu'il était alors possible de tomber sur une vidéo mensongère à propos de l'Ukraine dans les premières 40 minutes d'utilisation de TikTok. À l’époque, Chine Labbé, l'une des analystes ayant mené l'enquête, avait eu l'occasion d'expliquer à TF1info que la majorité de ces contenus étaient "de courts extraits avec des personnalités politiques expliquant que la Russie n’était pas l’agresseur et que l’Ukraine devait être dénazifiée".
"Un espace d'expression créative"
Car parmi ces fausses vidéos, celles de propagande prorusse sont légion sur la plateforme. En guise d'illustration, les hashtags #StandwithUkraine agrège à ce jour 2 milliards de vues, tandis que #StandwithRussia est nettement plus populaire, avec... 11 milliards de vues selon Visibrain. La mainmise de Pékin n'est pas sans lien avec la propagande qui y règne, selon plusieurs observateurs du conflit. Pour Marie Peltier, "il existe une grande solidarité entre les dictatures. On peut penser que l’intérêt chinois va être plutôt de tolérer le narratif russe", même si "les voix ukrainiennes ne sont pas absentes de TikTok, loin de là". En 2021, avant l'invasion de l'Ukraine, Moscou et Pékin auraient bien discuté d'un "accord de propagande" permettant de s'entendre sur l'échange d'informations en ligne, d'après une enquête de The Intercept.
Interrogé, TikTok assure interdire "les contenus inexacts, trompeurs ou faux qui sont susceptibles d’entraîner un préjudice important aux personnes ou à la société, en dépit du dessein de ces contenus" et valoriser plutôt "les contenus authentiques qui permettent à la plateforme de rester un espace unique de divertissement et d'expression créative".
Or, la violence est également présente sur l'application, avec des centaines de vidéos datant de fin 2022 et faisant la promotion de la milice russe Wagner, engagée à l'époque dans le conflit. Des contenus alors visionnés plus d'un milliard de fois, alertait NewsGuard dans une autre étude. C'est dans ce cadre que la plateforme a été rappelée à l'ordre à plusieurs reprises : par exemple, Reporters sans Frontières au printemps 2022, qui appelait TikTok à la responsabilité face aux faux contenus pullulant en ligne. Mais aussi la demande de plusieurs responsables européens pour que ByteDance respecte les règles européennes en matière de désinformation.
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Face à cela, TikTok se défend d'une absence de modération de ses contenus. Comme nous avons pu le constater, certaines vidéos sous le hashtag "UkraineWar" disposent bien d'un filtre "contenu sensible", permettant à l’utilisateur de ne pas voir son contenu sans cliquer dessus au préalable. "Près de 40 000 experts travaillent à la sécurité de la plateforme à travers le monde, et nous avons continué de renforcer nos équipes d'année en année. Nos experts parlent plus de 30 langues et dialectes, dont le français", nous indique par ailleurs la plateforme, citant un effectif de 687 modérateurs francophones le mois dernier.
Mais c'est sans compter sur la charge de travail demandée à ces milliers de salariés ayant pour mission de passer l'application au peigne fin. Selon des anciens modérateurs, interrogés dans le documentaire La Fabrique du Mensonge, il leur était demandé de vérifier quotidiennement quelque 300 vidéos. Ce qui pouvait aller en réalité jusqu'à 1000 vidéos chaque jour.
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