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| - Avec l'été, de nombreux magazines promeuvent les compléments alimentaires pour se "préparer" au soleil.Ces gélules sont supposées permettre d'accélérer le bronzage, voire protéger la peau des coups de soleil.Nous avons cherché à connaitre leur véritable efficacité avec Virginie Prod'homme, chargée de recherche à l'Inserm.
Entre les rayons des tubas et celui des crèmes solaires, ces gélules marron s'exhibent chaque été. Devenues une sorte de tarte à la crème de la presse féminine, les compléments alimentaires sont présentés comme la solution miracle pour "préparer sa peau avant l'été". Supposés tour à tour accélérer le processus de bronzage et même protéger la peau du soleil, ils se vendent de quelques dizaines à une petite centaine d'euros. Alors, bronzer plus vite et sans danger, est-ce-possible ? Pour le savoir, nous avons posé la question à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
Une efficacité "controversée"
Pour tout comprendre à ce sujet, il faut commencer par se remémorer le fonctionnement de ce mécanisme tout à fait naturel. Auprès de TF1info, Virginie Prod'homme, chargée de recherche à l'Inserm, rappelle que le teint halé si désiré pendant l'été n'est qu'une "réponse de stress de la peau aux rayons UV", ces ultraviolets émis par le soleil, "particulièrement nocifs pour notre santé". Face aux UVA, associés au vieillissement de la peau et à un risque accru de cancer de la peau et aux UVB, qui causent des brûlures, la peau va se protéger de deux manières. D'abord au niveau de la couche supérieure. Les cellules appelées kératinocytes vont se multiplier pour venir épaissir cette couche et la rendre plus imperméable aux rayons. Ensuite, plus profondément dans la peau, ce sont les mélanocytes qui vont être stimulés pour produire de la mélanine. C'est ce pigment brun - "qui colore notre peau, nos cheveux et même nos yeux" - qui va être distribué aux kératinocytes pour former un bouclier au-dessus des noyaux.
C'est pour répondre à ce "stress" que ces gélules sont proposées. Si chaque produit peut avoir une composition différente, ces compléments suivent le même modèle. À savoir celui d'un mélange d’antioxydants (les caroténoides) "qui ont pour objectif affiché de contrer le processus d'oxydation induit par les UV" en stimulant la production de mélanine. "Le plus connu est le bêta-carotène, mais on retrouve aussi du lycopène, contenu dans les tomates, des vitamines C et E", énumère notre interlocutrice, chercheuse au Centre méditerranéen de médecine moléculaire.
Le processus parait donc sensé. Mais qu'en dit la science ? Eh bien les preuves manquent. Comme le relève l'Inserm dans une note à ce sujet, une recherche sur les principaux moteurs de recherche de publications scientifiques montre "qu'il y a peu de données publiées par des équipes de recherche académiques pour évaluer l'efficacité et la sécurité" de ces compléments alimentaires. Mais à ce stade, les études démontrent "qu'il n'est pas anodin, ni forcément bénéfique, de consommer des vitamines et minéraux au long cours", pour reprendre l'analyse de la professeure Marie Thérèse Leccia publiée en 2008.
Tout d'abord, sur le court-terme, on manque cruellement de données disponibles à ce sujet. Aujourd'hui, seule une efficacité in vivo a été observée, chez la souris. Mais chez l'humain, un traitement de courte durée n'a pas montré son efficacité. "Pour reproduire ces conclusions, il faudrait prendre ces gélules bien en amont de l’exposition et pendant plusieurs mois", estime Virginie Prod'homme. Or, les études sur la prise de gélule sur le long terme démontrent un effet potentiellement délétère. En 2007, des travaux publiés par une équipe française montraient ainsi que ces apports pouvaient être favorables chez les hommes qui mangent moins de fruits et légumes, mais augmentaient le risque de cancers cutanés chez les femmes.
Au-delà de ce seul effet, c'est surtout le risque comportemental qu'il ne faut pas négliger. "Des travaux sociologiques ont montré que la prise de ces gélules va de pair avec une exposition prolongée à de fortes doses d'UV", note la chargée de recherche à l'Inserm. Car, tout comme le bronzage, ces gélules provoquent la fausse illusion d'une protection. "Pour le bronzage, on parle d'une protection équivalente à un indice de 2 ou 3 pour une crème solaire." Le bronzage, avec ou sans gélule, c'est donc "plus de risque, moins de bénéfices", comme le résumait un article scientifique en 2014. La gélule "pour bronzer" n'est pas dangereuse en soi, mais le comportement de celui qui la consomme - qu'il s'agisse du nombre d'heures à se dorer la pilule ou l'absence de crème solaire - comporte des risques très néfastes.
Face à cette absence d'efficacité sur le court terme et aux risques sur le long terme, la professeure Marie Thérèse Leccia appelait il y a plus de quinze ans à une modification de la législation concernant les compléments nutritionnels, afin "d’exiger de la part des laboratoires des études cliniques avant la mise sur le marché". Une alerte jamais entendue à ce jour.
Dans le cadre de notre #partenariat avec les @verif_TF1LCI @TF1Info , on vous propose une #série consacrée au #summerbody , cette tendance qui consiste à préparer son #corps avant l' #été . Episode 1⃣: Existe-t-il vraiment un #régime #miracle ?🍋🍅🥕🍞 👉 https://t.co/xCggEkqtvw pic.twitter.com/Gf8OsWRjZf — Inserm (@Inserm) July 19, 2022
En résumé, oui, le bêta-carotène est une substance qui stimule la production de mélanine, responsable de la protection et de la pigmentation de la peau. Et oui, la vitamine C est un anti-oxydant qui permet de réduire la réaction nocive des cellules de la peau aux UV. Mais non, cela ne doit pas passer par des compléments alimentaires. Il parait plus souhaitable de privilégier une alimentation équilibrée, qui permet par ailleurs d'apporter d’autres nutriments protecteurs, que de se tourner vers les compléments alimentaires, dont les données pour prouver leur efficacité manquent encore à ce jour. Et surtout, en aucun cas ces gélules ne doivent venir se substituer aux bons réflexes pour protéger sa peau.
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