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| - Masha Moskaleva, une Russe de 13 ans, a été séparée de son père et placée dans un foyer pour mineurs.Il s'agirait de représailles des autorités en raison d'un dessin à l'école dénonçant la guerre, lit-on sur les réseaux sociaux.Les autorités s'en défendent, mais la maintiennent isolée, accusant son père de discréditer l'armée russe.
En Russie aujourd'hui, des mineurs peuvent-ils être séparés de leurs parents et privés de contacts avec l'extérieur en raison de simples dessins pacifistes ? C'est en tout cas ce que suggèrent les messages postés en ligne et qui évoquent la situation de l'adolescente de 13 ans Masha Moskaleva. Des publications (nouvelle fenêtre) qui accompagnent une série d'articles dans la presse européenne, mettant en cause les autorités russes. TF1info fait le point sur la situation, ainsi que sur les accusations portées contre la collégienne et son père.
Qui est Masha Moskaleva ?
Âgée de 13 ans, Masha Moskaleva est une adolescente russe vivant à Iefremov, dans l'Oblast de Toula. Une ville qui compte entre 30 et 40.000 habitants, à 5 heures de route de Moscou, en direction du sud. Scolarisée au collège, elle a été invitée avec ses camarades de classe à réaliser un dessin en soutien à l'armée russe, dans le cadre d'un cours d'arts plastiques. Nous étions alors en avril 2022.
Le dessin de la jeune Masha est à l'origine de toute l'affaire : elle a représenté des drapeaux russes et ukrainiens sur lesquels figuraient des inscriptions telles que "Non à la guerre" ou "Gloire à l'Ukraine". On observe également une femme qui se tient aux côtés d'un enfant, tandis que des roquettes en provenance de Russie se dirigent vers eux. La professeure de dessin a alors rapporté les faits à la directrice de l'école, qui a contacté la police locale. Le début d'une série de péripéties pour l'ado et son père.
Russie : Masha Moskaleva, élève de 6e année, qui a fait un dessin pacifiste, est toujours en centre d'hébergement La jeune fille n'est pas autorisée à voir son père célibataire, assigné à résidence dans le cadre d'une affaire visant à "discréditer" l'armée russe. pic.twitter.com/yby63ZnoAk — Rebecca Rambar (@RebeccaRambar) March 8, 2023
Qu'est-il reproché à Masha et à son père ?
Masha Moskalev est élevée par son père Alexei 54 ans, qui s'occupe d'elle seul depuis le départ de la mère de l'adolescente quand elle avait 3 ans. Il a expliqué qu'au lendemain de l'incident du dessin, il a accompagné sa fille à l'école car celle-ci avait peur de s'y rendre et avait reçu des pressions. Lorsqu'il s'est rendu au sein de l'établissement, des membres de l'équipe éducative ont remarqué sa présence et ont contacté la police. Il a subi un interrogatoire, suivi d'un examen de ses publications sur les réseaux sociaux.
La police a "trouvé des commentaires en faveur de l'Ukraine", rapporte (nouvelle fenêtre) le média russe Novaya Gazeta, ajoutant que le père de l'adolescente a été poursuivi pour un commentaire posté en ligne. Une procédure menée "en vertu de l'article sur les 'actions publiques visant à discréditer les forces armées de la Fédération de Russie'", qui s'est soldée par un procès "le même jour". Par la suite, "Alexei a été condamné à une amende de 32.000 roubles (nouvelle fenêtre) (397 euros)".
La collégienne a été scolarisée à domicile suite à ces incidents, avant qu'une perquisition soit menée au domicile familial à la veille du nouvel an. Accompagnée d'un violent interrogatoire visant le père de famille. Quand le duo décidé de déménager en début d'année pour tenter d'échapper aux persécutions dont il s'estime victime, les autorités y voient le signe d'une tentative de fuite. La police part à la recherche d'Alexei Moskalev et l'arrête. Il est placé à l'isolement. Sa fille Masha, quant à elle, est placée (nouvelle fenêtre) dans un centre d'accueil pour mineur. Les sources russophones évoquent (nouvelle fenêtre) son maintien dans un "orphelinat", mais utilisent aussi le terme de foyer de "réhabilitation" pour mineurs ou de "centre de réinsertion sociale" pour désigner le lieu où elle séjourne.
Qu'en est-il aujourd'hui de la famille ?
La détention d'Alexei Moskalev a été levée, mais il reste assigné à résidence et n'a aucun contact avec sa fille. La jeune Masha a reçu la visite d'une représentante de l'association OVD-Info, qui tente d'informer et de soutenir les victimes persécutions politiques en Russie. Une élue locale nommée Olga Podolskaya a, pour sa part, cherché à plusieurs reprises à rencontrer l'adolescente. Elle s'est présentée à plusieurs reprises au centre où elle est retenue, sans pouvoir échanger avec elle. Lors de son troisième passage, les portes de cette institution sont même restées closes (nouvelle fenêtre). La Russe de 13 ans serait privée de téléphone et de tout contact avec ses proches, à commencer par son père.
Celui-ci attend désormais un futur jugement (nouvelle fenêtre) : les médias évoquaient il y a quelques semaines le risque d'une peine de prison conséquente, de l'ordre de 3 ans s'il était désigné coupable de dénigrement envers les forces armées. Il pourrait par ailleurs perdre ses droits parentaux.
Assez discrètes, les autorités russes expliquent (nouvelle fenêtre) que "l'enfant est en train d'être préparé à reprendre des activités éducatives normales" tandis qu'une "recherche est en cours pour retrouver sa mère". Selon l'argumentaire des services sociaux justifiant cette séparation forcée, Masha Moskalev ne se serait pas rendue à l'école pendant longtemps et, "durant cette période, son père n'a pas pris contact avec le corps enseignant". Une raison justifiant, pour les autorités, que la police se soit "penchée sur la situation de cette famille, et non à cause du dessin réalisé à l'école".
Une pétition recueille plus de 100.000 signatures
Il y a quelques jours, une pétition en ligne a été lancée (nouvelle fenêtre), avec un message simple : "Ramenez Masha Moskaleva à la maison". Elle a dépassé les 100.000 signatures et cherche à mobiliser l'opinion publique afin d'éviter une séparation définitive d'avec son père. "Nous exigeons que la décision de la commission des affaires juvéniles de la région de Tula, qui a envoyé l'élève de sixième dans un orphelinat, soit annulée et que Maria soit immédiatement libérée au domicile de son père", peut-on lire.
S'opposer à la guerre, un risque majeur en Russie
En Russie, s'opposer au pouvoir est aujourd'hui risqué. Les médias qui évoquent de manière critique la situation de Masha Moskaleva sont généralement des organes de presse interdits par les autorités, dont les sites Internet sont bloqués à travers le pays et seulement accessibles à l'étranger ou via l'usage de logiciels spécialisés. Selon l'association OVD-Info, contactée (nouvelle fenêtre) par France 24, plus de 400 personnes ont été condamnées ou inculpées pour des faits d'activisme anti-guerre. Une porte-parole confie que cette affaire "s'inscrit dans une tendance beaucoup plus large et terrifiante. Le gouvernement russe sait que les mineurs sont généralement ceux qui s'opposent le plus à la guerre. Ils ont davantage accès à Internet, ils regardent moins la télévision russe et, dans l'ensemble, ils sont beaucoup plus progressistes." Leur pouvoir de subversion est ainsi particulièrement redouté.
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