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| - Invité sur France Inter, le judoka double médaillé d’or dit être une "arme blanche" au regard du droit français.Une affirmation qui a tout du mythe et qui persiste pourtant dans l’imaginaire collectif.
Avec son double sacre aux Jeux olympiques, on le savait invincible. Mais Teddy Riner est-il également dangereux aux yeux de la loi ? C’est ce qu’a expliqué le champion de judo, le 16 septembre sur France inter : "En France, on (les judokas, ndlr) est considéré comme des armes blanches. Il y a des choses qu’on doit faire et qu’on ne peut pas faire. On doit être conscient de ça".
Avant de préciser sa pensée, comme on peut l'entendre dans cet extrait partagé sur Instagram : "Il y a des techniques qu’on emploie au judo, dans le cadre du judo, qui soumettent l’adversaire. Et quand on soumet l’adversaire, pour qu'il ne tombe pas dans les vapes ou pour ne pas lui casser une articulation, on tape trois fois. On gagne le combat. Mais surtout, on doit relâcher l’adversaire".
"Prendre la fuite est un bon conseil"
Mais de quoi parle exactement l’athlète en se qualifiant d’"arme blanche" ? Au fil de nos recherches, on constate que le sujet est régulièrement discuté en ligne, et en particulier sur des forums. Sur Quora, on peut lire par exemple qu’en cas de bagarre de rue, pour les pratiquants expérimentés d'arts martiaux, "prendre la fuite est un bon conseil. Gagner une bagarre peut être mauvais pour vous. Perdre une bagarre peut être mauvais pour vous. Ne pas se battre est la meilleure alternative dans la plupart des situations".
Un judoka, tout comme un karatéka ou toute personne entrainée aux arts martiaux, est-il considéré comme une arme blanche ? Que dit la loi sur leur capacité à se défendre ? Le Code pénal définit avant tout une arme comme "tout objet conçu pour tuer ou blesser". Il peut s’agir d’une arme au sens classique du terme ou bien de "tout autre objet susceptible de présenter un danger pour les personnes". En revanche, un être humain ne peut pas être assimilé à une arme. "Le droit ne considère absolument pas les gens qui ont une maitrise d’un art de combat comme des armes", tranche Jean-Baptiste Thierry, professeur en droit pénal à l’université de Nancy et membre des Surligneurs.
La légitime défense étudiée au cas par cas
De plus, le simple statut de sportif professionnel, ou bien de militaire, ne peut être considéré comme une circonstance aggravante. La seule chose qui va être appréciée par le juge est la légitime défense, qui doit être immédiate, nécessaire et proportionnelle à l’attaque selon le Code pénal. "Imaginons un judoka qui est agressé et qui riposte en employant des techniques de judo. On va apprécier si sa riposte est proportionnée ou non à l'agression dont il est victime", souligne le juriste. Le seul critère de la proportionnalité est alors étudié, comme on peut le voir à travers la jurisprudence.
Dans un jugement du 5 novembre 1992, la Cour d’appel de Grenoble n’a pas retenu la qualification de légitime défense dans le cas d’un judoka de bon niveau qui avait répondu à un coup de poing par un étranglement entraînant la mort de la victime. Les juges ont alors considéré que sa technique de judoka lui permettait de riposter par une prise moins dangereuse et suffisamment efficace. De la même manière, la légitime défense avait été exclue par la Cour de cassation en 2012, dans une affaire impliquant un membre de l’armée : ce "militaire de carrière à la stature physique imposante" avait tiré deux balles dans la cuisse de son agresseur qui lui avait asséné plusieurs coups de poing, employant ainsi "des moyens de défense manifestement disproportionnés à la gravité des coups portés".
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Si la métaphore de l’arme blanche a le mérite d'être comprise de tous, elle n’en reste pas moins inexacte. Cependant, ce qu’ajoute Teddy Riner au cours de l’interview se révèle plus juste, selon Jean-Baptiste Thierry. "Quand on apprend à étrangler des gens, ce n'est pas pour s'en servir ensuite. Le fait que ces techniques-là soient réservées à un cadre déterminé, sportif en l'occurrence, fait qu'on ne les emploie pas en dehors du cadre sportif."
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