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| - Un internaute explique que 40.000 enfants seraient réduits en esclavage dans les mines de RDC.Ils seraient utilisés pour l'exploitation du cobalt, indispensable notamment aux batteries des véhicules électriques.Si ce chiffre est à utiliser avec prudence, les conditions de travail dans les mines du pays sont régulièrement dénoncées.
Les consommateurs occidentaux qui se tournent aujourd'hui vers les véhicules électriques font-ils preuve d'une certaine hypocrisie ? C'est ce que suggère un internaute, qui dénonce les conditions dans lesquelles sont extraites en Afrique certaines des ressources indispensables à la construction des batteries. "Il y a 40.000 enfants esclaves au Congo [...] qui travaillent dans les mines de cobalt pour faire les batteries de vos voitures. Pas grave", peut-on lire dans un message teinté de cynisme. Une publication relayée sur Twitter et qui s'accompagne d'une vidéo non sourcée, qui semble de prime abord montrer une mine à ciel ouvert dans un pays africain.
Les mines dites "artisanales", une dérive en RDC
Que sait-on de cette séquence et de ce chiffre marquant ? Des recherches d'images inversées permettent d'identifier le lieu où ont été tournées ces images, ainsi que d'en retrouver l'origine. C'est un certain Siddharth Kara qui les a relayées (nouvelle fenêtre) initialement : auteur et chercheur américain, il est spécialisé depuis une vingtaine d'années sur les sujets relatifs à l'esclavage moderne. Enseignant à Harvard, il lui arrive également d'apporter son expertise à diverses agences des Nations unies. La séquence en question est présentée comme ayant été tournée en République démocratique du Congo (RDC). Sa date précise n'est pas fournie, mais elle fait partie d'une série de documents collectés ces dernières années par l'expert.
Depuis 2018, Siddharth Kara a concentré son attention sur l'exploitation du minerai en Afrique, et plus particulièrement sur celle du cobalt en RDC. En se rendant sur place, il explique qu'il s'attendait "à voir des conditions assez misérables, mais l'ampleur, la gravité de ce qui se passait, l'énormité de la violence contre les gens et l'environnement là-bas" l'ont "vraiment choqué". Il s'est donc focalisé sur cette problématique, à laquelle il a notamment consacré un essai.
La RDC produit environ 70% des ressources mondiales de cobalt, un métal rare devenu indispensable dans la construction des smartphones et autres véhicules électriques. Si 95% de la production dans le pays est assurée par des grands groupes industriels, les spécialistes expliquent que l'essentiel des irrégularités sont observées dans les mines "artisanales" exploitées en toute illégalité. Ce terme désigne des sites où l'extraction s'effectue sans outils mécaniques, par des individus qui ne bénéficient d'aucune protection et travaillent le plus souvent à mains nues. Disposant, au mieux, de quelques outils légers. Un travail effectué dans des conditions de sécurité plus que précaires et pour des salaires de misère. Ce sont des intermédiaires qui se chargent de rassembler le cobalt extrait par ces filières, avant de le réinjecter dans les circuits plus traditionnels menant vers l'exportation des ressources.
"Nous parlons de centaines de milliers de personnes" travaillant dans ces exploitations interdites, témoignait Siddharth Kara au printemps. Parmi elles figurent "des dizaines de milliers d'enfants, dont les plus jeunes ont cinq ans". Des ONG alertent régulièrement sur les conditions de vie des mineurs en RDC, soulignant que la main d'œuvre la plus jeune est généralement la plus corvéable et la moins bien rémunérée. Amnesty International, dans une publication de 2016, se référait à un rapport de l'Unicef paru deux ans plus tôt en 2014. Ce document soulignait qu'environ "40.000 enfants travaillaient dans les mines dans le sud de la RDC, dont beaucoup dans des mines de cobalt". Un chiffre désormais assez ancien et qu'il faut manier avec prudence, puisque le travail des enfants, à l'instar d'autres activités illégales comme le trafic de drogue, reste délicat à évaluer.
Une régulation difficile
Officiellement, les autorités de la RDC dénoncent les activités minières dites "artisanale", mais celles-ci perdurent malgré les interdictions. Une situation qui s'explique en partie par le fait que l'extraction de ces ressources naturelles constituent souvent pour les familles concernées l'une des rares sources de revenus. Les entreprises qui ont recours massivement au cobalt, quant à elles, réagissent de manières assez diverses. Elon Musk, à la tête de Tesla, souhaite l'installation de "webcams" dans les mines pour s'assurer de la légalité des activités, tandis que Renault diversifie pour sa part ses réseaux d'approvisionnement. Un vaste contrat a par exemple été noué avec une entreprise marocaine pour bénéficier de cobalt à partir de 2025.
À n'en pas douter, la question des métaux précieux et de leur extraction va continuer à se poser à l'avenir, notamment parce que l'industrie automobile n'est pas la seule à voir ses besoins en cobalt se multiplier. La téléphonie, pour ne citer qu'elle, se révèle également très friande de cette denrée rare. L'Agence internationale de l'énergie estime que la demande mondiale de cobalt, liée notamment à la transition énergétique, pourrait se voir multipliée par 20 à l'horizon 2040.
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