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| - Alors qu'une menace de grève à la SNCF pèse sur les vacances de Noël, la question de l'interdiction des mouvements sociaux pendant les vacances scolaires refait surface.Des propositions en ce sens sont régulièrement formulées et déposées par des parlementaires de droite, la dernière en date émanant du député Eric Ciotti (Union des droites).Mais interdire les grèves sur certaines périodes, est-ce vraiment possible en France ?
Les vacances de Noël sont-elles menacées ? Plusieurs syndicats de la SNCF ont appelé à la grève du 20 au 22 novembre, mais aussi à une grève reconductible à partir du mercredi 11 décembre. La menace d'un prolongement qui viendrait gâcher des milliers de départs en vacances pèse donc sur les fêtes de fin d'année. Inconcevable et inadmissible pour le chef des députés Union des droites Eric Ciotti. Invité de TF1 ce mercredi 13 novembre, il a annoncé qu'il allait déposer une proposition de loi visant à "interdire la grève pendant la période des vacances de Noël". Il souhaite aussi interdire les mouvements sociaux "les premiers et les derniers jours de départ en vacances" durant toutes les vacances scolaires, et "les jours fériés".
Les propositions en ce sens ne sont pas nouvelles. Dès février 2020, les Sénateurs Républicains avaient déposé une proposition de loi pour "assurer l'effectivité du droit au transport, à améliorer les droits des usagers et à répondre aux besoins essentiels du pays en cas de grève". Trois ans plus tard, en février 2023, c'est la députée non-inscrite de Vendée, Véronique Besse, qui avait évoqué la possibilité d'interdire "toute grève dans le secteur des transports les veilles de vacances scolaires, durant les vacances scolaires et les jours fériés". Mais est-il vraiment possible en France d'interdire une grève sur une période donnée ? Pas si simple.
Dans l'Hexagone, le droit de grève est protégé par le préambule de la Constitution, mais il n'est pas accordé à certains agents publics comme les militaires, les policiers, les agents pénitentiaires ou les magistrats. D'autres bénéficient d’un droit de grève limité et doivent assurer un service minimum, c'est le cas des agents publics des transports collectifs. Toutefois, il est possible pour le pouvoir exécutif de décider de limiter le droit de grève, au nom de l'article L1111-2 du Code de la défense, qui autorise la mobilisation générale de tout ou une partie de la population "en cas de menace portant notamment sur une partie du territoire, sur un secteur de la vie nationale ou sur une fraction de la population".
Il peut aussi être limité si l'intérêt général à interdire la grève est démontré. C'est là toute la difficulté, selon le chargé de recherche au CNRS en droit social et membre du collectif des Surligneurs Pascal Caillaud. Selon lui, les propositions de loi formulées par les élus de droite ne peuvent "pas passer constitutionnellement". "C'est trop disproportionné par rapport à l'intérêt général", pointe-t-il auprès de TF1info, constatant que le texte engloberait, selon ses calculs, "20 semaines de vacances scolaires et 11 jours fériés. Interdire le droit de grève sur presque la moitié de l'année me semble disproportionné". Aussi, "la question des vacances part d'un présupposé que tout le monde a des enfants. Cela me paraît difficile à mettre en avant pour limiter le droit de grève d'agents publics", complète le spécialiste.
Suivre l'exemple de l'Italie ?
"Est-ce que les vacances scolaires de ceux qui ont des enfants ou ceux dont les grands-parents sont encore vivants, c'est de l'intérêt général ? Personnellement, je ne suis pas sûr que cela puisse être considéré comme tel. D'autant que tout le monde ne prend pas les transports collectifs pour se retrouver", argumente-t-il. "Cela voudrait dire que les gens qui partent hors saison et qui n'ont pas d'enfants ne seraient pas couverts par cette protection." Selon lui, la proposition de la députée aurait eu plus de chances d'avoir une issue positive si elle proposait un aménagement du droit de grève ou du service minimum.
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Autre piste régulièrement évoquée pour limiter les grèves durant les vacances : la mise de place de "périodes préservées" comme en Italie, qui interdit par exemple aux employés des réseaux de transports de faire grève pendant la période des fêtes de Noël, ou encore à Pâques. Mais Pascal Caillaud y voit une autre difficulté : le caractère religieux des dates qui pourraient être choisies. "Je ne sais pas comment est rédigée la Constitution italienne, mais les jours choisis en Italie présentent un caractère religieux, et seraient plus difficiles à faire accepter en France. Je ne vois pas comment le choix lié à certaines fêtes auxquelles on donnerait un caractère de rassemblement de famille pourrait passer."
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